L'art qui-es-tu, que fais tu? Imprimer
Écrit par LiMass   
Jeudi, 29 Mai 2008 13:30
On m’a questionné il y a quelque temps de cela, « a quoi sert l’art ? ». A première vue j’ai envie de dire : l’art sert à la vie, ou la vie sert à l’art. Dans cette situation je commence à moi-même me demander, qui sert qui ? Comme plasticien je n’ai pas l’impression que l’art me sert. Au contraire c’est moi qui sers l’art (peut-être me dis-je ?) Ou nous nous servons mutuellement. Ou bien, à quoi sert de découvrir que l’art est à notre service ou le contraire ? Et pourquoi dois-je trouver une réponse à l’utilité de l’art ?!!

L’échelle historique et les dimensions infinies de l’art, demandent aux créateurs de composer dans tous les domaines artistiques, pour sa continuité. Comme acteur, dans cette voie illimitée mon rôle reste petit et sûrement obligatoire. Est-ce que mon rôle est obligatoire ? Pourquoi pas, pourquoi oui ? Et voilà je pense qu’une partie de la réponse se cache derrière cette question.

L’art est mort il y a longtemps. Je sens la respiration d’un mort qui veut se réincarner dans mes profondeurs. Cela me rend esclave de cette âme. Un mort qui réveille la vie éternelle dans ma vie mortelle. Donc l’art meurt et renaît au bout des doigts de l’artiste, dans son souffle, dans ses mouvements corporels, dans son intelligence subtile et créative. Tous cela,

Pour que la vie laisse des traces immortelles des hommes.

Pour que les beautés restent à l’infini.

Pour que l’amour trouve des poches d’oxygènes.

Pour que les dimensions humaines s’élargissent.

Pour que la vie aille dans le bon sens,

Pour que l’espoir ne cesse pas.

Pour que l’art ne se taise pas. Etc… Etc..

Je pense que l’art est la meilleure invention que l’homme ait découverte. Un aspect qui donne à l’homme l’image des dieux créateurs. Peut-être l’art est-il le seul élément qui place l’homme à sa juste place dans la nature de ce monde. Il sert sûrement à cela. Je pense aussi que l’art est également orphelin, sans propriétaire et sans lieu sûr pour se loger. Une vie dans la vie, une lumière dans l’obscurité, un parfum de bonté quand tout est nauséabond, tout simplement l’art est l’espoir. Le seul passage qu’il utilise pour apparaître est le chemin tourmenté qui se trouve dans les entrailles des artistes.

Où il y a de l’art, n’existe pas la famine de l’âme. Ce qu’il crée et ce qu’il observe, se nourrit du même hors-d’oeuvre mais différemment. Et l’art se nourrit à son tour. Cette nourriture divine sert aussi à des aspects sociaux. L’art tisse des liens entre les humains. Dans l’objectif de l’art, tous les hommes sont égaux. Mais l’homme malheureusement, sépare l’art et l’artiste. Il lui colle des étiquettes avec des prix, il les met dans des marchés sans pitié et il vulgarise l’art à son image. Il utilise aussi l’art pour camoufler ses démons sanguinaires, qui sont parfois dans ses croyances, parfois dans sa politique, dans son économie, dans tout ce qui nourrit son égoïsme et son égocentrisme. Heureusement tout n’est pas noir. Les hommes honnêtes de bonne volonté font face à toutes ses margoulettes. Pour que l’art et l’artiste ne perdent pas leur juste place dans ce vaste monde.

L’artiste est comme une espèce rare en voie de disparition dans notre société. Cet être si sensible, si doué, si fragile ne naît pas a chaque accouchement d’une mère. Sans différencier l’artiste de nous autres, avec mes respects à sa juste valeur, je salue son courage d’exister pour affronter l’inconnu, pour qu’il nous amène des œuvres uniques, pour qu’il serve à l’immortalité de l’art. Il est la valeur lui-même ou il est le gardien des valeurs humaines souvent. Mais aujourd’hui il n’a de la valeur, que s’il draine de l’argent. Celui qui gagne de l’argent comme un banquier est un artiste. Même son œuvre n’a rien à avoir avec l’art. Cela me désole.

L’art, l’artiste et la société ne peuvent que coexister, mais on jette l’art et l’artiste, dans les déchets absurdes de nos ignorances. L’artiste contemporain qui vit a un souffle de nous et souvent oublié, alors comment peut-on parler des millions que l’on dépense pour l’art en cadavres avec fierté ? Dans une société moderne, si l’artiste est sans statut social, alors comment peut-on parler du progrès, comment peut-on appeler les artistes à créer, en oubliant leurs besoins essentiels ?

Je reviens à l’art, le guide qui m’emporte aux merveilles des merveilles.

La force qui nous transforme en bonne, la plus belle joie qui traverse les siècles, la musique de la paix, la dimension humaine absolue, le plus beau cadeau pour les enfants de demain c’est l’art. L’univers ne peut que se reconnaître dans les créations des hommes. Mais pas dans ses bêtises. L’art sert à ce que le soleil continue de se lever, l’art sert pour que nos enfants aient encore le sourire au bout des lèvres, l’art sert à ce que notre bonne foi reste pure, l’art embellit nos rêves, l’art sert à la flamme de la vie pour qu’elle reste entière. L’art nous sert de l’amour, nous rend beaux, nous rend humains, nous impose le bien, l’art est notre reflet. Alors l’art ne sert pas qu’à lui-même, l’artiste n’est pas seulement le passage magique de l’art. Il laisse derrière lui des preuves pour dire que nous avons existé et nous existeront.

Bayram Bozkurt

24. 01. 2008-01-25 Genève.